Chemin Spirituel
Shankara et le renouveau hindou
Le bouddhisme a été accueilli avec enthousiasme dans ces autres pays, mais il a continué à lutter pour gagner et conserver des adeptes en Inde. L'hindouisme offrait une plus grande variété de rituels et d'apparats, tout en mettant en avant le concept selon lequel tout le monde détenait une étincelle de divinité, tout le monde était en fait un être divin et faisait partie de l'univers, ce qui contrastait fortement avec la doctrine bouddhiste de vacuité du soi et de simplicité d'observance.
Les efforts de conversion du bouddhisme ont été entravés par le renouveau hindou des 8e et 9e siècles ap. JC, encouragé (du moins selon la tradition) par le sage Shankara qui prônait la doctrine de l'Advaita Vedānta (« non-dualité ») mettant l'accent sur la réalité ultime de Brahman, l'existence de l'ātman et la nature illusoire de tout le reste. Seul Brahman existe et les êtres humains existent, à travers l'ātman, comme des parties de Brahman. Shankara a attaqué la pensée bouddhiste pour sa négation de l'ātman, mais sa conception de la libération par l'unicité de l'ātman avec Brahman est similaire au concept bouddhiste de l'atteinte du nirvana par le non-attachement.
La doctrine de Shankara reposait sur l'acceptation par ses adeptes d'un programme fondé sur la révélation de la réalité ultime. Ce programme comportait quatre aspects d'égale importance :
- Śāstra - les écritures
- Yukti - la raison
- Anubhava - la connaissance par l'expérience
- Karma – les actions spirituellement pertinentes
Un étudiant se soumettait à un enseignant qui l'aidait à comprendre les écritures, à appliquer la raison et l'expérience à l'interprétation des écritures, et à agir correctement sur cette interprétation. Selon certains chercheurs, ce paradigme a directement influencé le bouddhisme ésotérique. Selon d'autres points de vue, les fondements du bouddhisme ésotérique, en particulier la relation personnelle avec un esprit ou une divinité, étaient déjà vieux de plusieurs siècles au moment de l'apparition de Shankara. Selon ce point de vue, il a peut-être influencé la forme de bouddhisme ésotérique du 8e siècle ap. JC, mais sa doctrine n'a pas inspiré ou façonné les croyances et pratiques fondamentales.
Le bouddhisme ésotérique en Chine et au Japon
Le bouddhisme ésotérique est arrivé en Chine par la route de la soie au début du 7e siècle ap. JC et il a été adopté par la dynastie Tang (618 - 907 ap. JC). Le bouddhisme avait été introduit des siècles plus tôt grâce aux efforts missionnaires d'Ashoka et les Chinois étaient donc déjà familiarisés avec les enseignements de base et le message général. Le bouddhisme tantrique, cependant, prétendait offrir une expérience plus immédiate de l'illumination spirituelle et il devint plus populaire que la version traditionnelle. De grands maîtres bouddhistes ont voyagé en Chine pour aider à développer des centres d'apprentissage et traduire des textes, et des sages chinois se sont rendus régulièrement en Inde pour trouver et rapporter des copies et des traductions de plus.
L'Inde était reconnue comme le berceau du bouddhisme et les sages s'y rendaient spécifiquement pour trouver, traduire et rapporter tout ce qu'ils pouvaient trouver. Parmi eux, le célèbre Xuanzang (602 - 644 ap. JC) a défié l'édit impérial de l'empereur chinois Taizong (r. 626 - 649 ap. JC) contre les voyages à l'étranger pour se rendre en Inde en 627 ap. JC. Il est connu pour avoir traduit le Soutra du cœur de la perfection de la sagesse, qui reste le plus populaire et le plus souvent récité par les bouddhistes en Chine et dans le monde.
Les sages bouddhistes indiens ont été invités en Chine pour enseigner et traduire, et la collection chinoise de textes bouddhistes s'est développée sous leur direction. Les textes traduits tentaient régulièrement d'imiter les originaux aussi fidèlement que possible, comme le notent les chercheurs Forrest E. Baird et Raeburne S. Heimbeck.
Le système de croyance a voyagé de la Chine au Japon, où il a été encouragé par le prince Shotoku (r. 594-622 ap. JC) qui a contribué à l'établir dans tout le pays. Le bouddhisme ésotérique a été affiné, systématisé et diffusé par Kukai (également connu sous le nom de Kobo Daishi, 774 - 835 ap. JC), un moine érudit et poète qui a fondé le bouddhisme Shingon au Japon. Le bouddhisme Shingon (« Parole vraie ») adhérait à la vision cosmique du bouddhisme comme un ensemble éternel de règles qui avaient été clairement énoncées par le Bouddha mais qui n’étaient pas conçues par lui. De plus il n’avait pas été le premier bouddha et il n’était certainement pas le dernier. Le Shingon, comme le bouddhisme Vajrayāna, prétendait que l'on pouvait atteindre l'illumination complète au cours de sa vie et seulement en se soumettant à la discipline d'un maître vertueux.